Un matin à Byblos
Il existe une ville dont le nom est Livre. Sait-on pourquoi ? Nous avions même perdu sa trace. Elle ressemble à un mille-feuille et elle est, dit-on, la plus vieille cité du monde. Chacune de ses couches en cache une autre. Entre la préhistoire et les matins d'aujourd'hui, Byblos la Phénicienne a gardé des fragments égyptiens, assyriens, babyloniens, perses, grecs, romains, byzantins, arabes, francs... Le premier témoignage de notre écriture provient du sarcophage d'un roi de Byblos. Pour passer du phénicien au grec, il a suffi d'un demi-tour et de
quelques voyelles ; du grec à l'écriture latine, de rapides coups de serpe. Se promener sur le tertre de Byblos entre la mer et la montagne du Liban invite à la méditation. C'est ainsi que j'ai convié dans ce petit livre rien de moins que l'Histoire et les écritures, le Temps et l'Amour, Isis et la Bible. J'y ai rencontré une Arabe et deux Chinois, j'y ai ajouté des propos courroucés sur la langue française et l'Europe,
laquelle fut enlevée par Zeus près de Byblos. L'ensemble peut paraître décousu. C'est ma manière. J'aime assembler des éléments qui n'ont pas l'habitude de convoler. Il y a des airs qui rendent la connaissance ludique. Et comme épices : de l'humour. Le matin a vagabondé jusqu'à la nuit sur les ruines. Une intelligence est pauvre si elle n'est éclairée par la nuit. Les étoiles auront le dernier mot, à moins que ce ne soit le vin du Château Ksara...