Les origines
Créées le 1er novembre 1943, les éditions du Rocher sont liées de 1943 à 1965 à leur principal fondateur, Charles Orengo (1913-1974). Elles font partie des rares maisons nées sous l’Occupation, rescapées et toujours vivantes aujourd’hui.
En 1943, les éditions Plon apportent leur concours financier et éditorial à Charles Orengo, assisté de l’écrivain et ancien ministre radical Jean Mistler (1897-1988) et de l’imprimeur ardéchois Jean Bétinas (1914-1984), pour débuter cette nouvelle aventure littéraire depuis Monaco.
Lancée en pleine période de pénurie de papier, tandis que le territoire français n’est pas totalement libéré du joug nazi, la maison publie dix-huit ouvrages dès 1944. Le premier d’entre eux sera un ouvrage de Georges Duhamel, secrétaire perpétuel de l’Académie française, dont le nom fut très tôt inscrit sur les listes d’interdiction allemandes. Seront publiés aussi cette année-là deux poèmes de Pierre Emmanuel, membre du comité de Libération de la Drôme, écrits dans le Vercors.
De 1945 à 1951, les éditions du Rocher élaborent une politique éditoriale de littérature générale autour de plusieurs auteurs de renom : Duhamel, Emmanuel, Giraudoux, Giono ou encore Colette. Les premières collections voient le jour : « Grands et petits chefs-d’œuvre », « Petits classiques illustrés », « Le monde d’aujourd’hui » ou « Le Sel de la Terre ». La littérature étrangère est aussi présente avec le roman Un cœur fier de l’Américaine Pearl Buck, publié en 1945.
En 1948, les éditions emménagent au 28, rue Comte Félix Gastaldi sur le rocher à Monaco. Cette adresse reste le siège actuel de la maison.
À partir de 1949, Charles Orengo s’installe à Paris au poste de conseiller technique auprès de la direction de la librairie Plon. Les éditions du Rocher connaissent alors une période économique difficile.
Les années 50
En 1953, la maison est en pleine relance et son catalogue s’enrichit des plumes de Jean Cocteau, Henri Michaux, Pierre Reverdy, Ernst Jünger, Jorge Luis Borges, Alban Berg et Serge Lifar, pour ne citer que les plus grands. Dans cet élan, la maison s’honore également de la collaboration ponctuelle de Salvador Dali et Pablo Picasso pour deux livres illustrés de luxe. Une collection musicale, « Domaine musical », fer de lance du dodécaphonisme, est mise sur pied.
L’image littéraire des éditions du Rocher prend forme et la maison s’ouvre à de nouveaux domaines : l’histoire (sous la direction de Louis Evrard) et les essais.
La période 1952-1964 se singularise par l’affirmation d’une identité littéraire plus nette et aussi plus resserrée. Mais, en 1964, la situation financière se dégrade à nouveau.
1965-1980
En octobre 1965, les éditions du Rocher deviennent une filiale du groupe des Presses de la Cité.
De 1965 à 1977, aucune politique éditoriale globale ne coordonne les parutions et l’ensemble des titres publiés sur la période est assez disparate et contrasté.
En 1977, Jean-Paul Bertrand, alors directeur financier du groupe, obtient la possibilité de publier quelques ouvrages aux éditions du Rocher et enrichit le catalogue d’une cinquantaine de titres.
Les années 80 et la reprise par Jean-Paul Bertrand
C’est avec la publication, en novembre 1980, de Nostradamus : historien et prophète de Jean-Charles de Fontbrune – succès incroyable avec plus de 1,3 millions d’exemplaires vendus – que Jean-Paul Bertrand relance véritablement les éditions du Rocher.
Christian Jacq devient directeur littéraire et le nombre de parutions passe de deux à quatre titres par mois. De nouvelles collections voient le jour : « Équilibre », « Les Maîtres de la littérature policière », « L’Esprit et la Matière ».
En novembre 1987, Jean-Paul Bertrand quitte le groupe des Presses de la Cité et rachète Le Rocher, qui retrouve alors l’indépendance de ses débuts.
La diffusion et la distribution sont confiées, en 1990, au CDE et à la SODIS, filiales des éditions Gallimard.
La maison devient le repaire de jeunes auteurs tels que Thierry Ardisson, Frédéric Berthet, Patrick Besson, Alain Bonnand, Olivier Frébourg, Jean-Michel Gravier, Marc-Édouard Nabe, Daniel Picouly, Éric Neuhoff et Jean-René Van der Plaetsen.
Jean-Paul Bertrand est alors en passe de gagner son pari : prouver qu’il est possible de développer une maison indépendante en dehors des grands groupes de l’édition. La maison installe ses bureaux parisiens place Saint-Sulpice où elle accueille de nombreux auteurs confirmés – Jean-Edern Hallier, Alphonse Boudard, etc. –, rejoints par de jeunes écrivains auxquels elle donne leur première chance : Philippe Delerm, Michel Houellebecq, Joël Egloff, Shan Sa, pour ne citer qu’eux.
Le catalogue compte désormais un grand nombre de collections, parmi lesquelles « Nuage Rouge », consacrée aux Indiens d’Amérique du Nord, créée et dirigée par Olivier Delavault ; « Anatolia » fondée et dirigée par Samuel Brussell ; « L’Art de la guerre » où Christine de Grandmaison présente les textes essentiels des cultures stratégiques de tous les continents ; « Le Roman de… » dirigée par Vladimir Fédorovski ; « Transdisciplinarité » de Basarab Nicolescu ; « Champollion », qui explore l’histoire de l’Égypte ancienne, dirigée par Christiane Hachet ; « Colère » de Jean-Marc Parisis ; « Esprits libres » de Chantal Chawaf, « Voix intérieures » de Francine de Martinoir.
Les années 2000
La maison et ses auteurs reçoivent plusieurs prix dont le plus prestigieux sera sans doute le Renaudot, accordé en 2001 à Martine le Coz pour son roman Céleste.
Pierre-Guillaume de Roux devient directeur littéraire et la maison s’agrandit, notamment avec l’acquisition des éditions Lo Païs, André Silvaire, du Serpent à plumes (qui vole de nouveau de ses propres ailes depuis janvier 2014) et de la collection « Motifs ».
En 2005, Jean-Paul Bertrand cède les éditions du Rocher aux éditions Privat avec une participation de Gallimard. La maison est intégrée au sein du groupe pharmaceutique Pierre Fabre. Elle entre alors dans une nouvelle période de trouble. Les directions éditoriales se succèdent, le nombre de nouveautés publiées chaque année est toujours très important, et l’image de la maison en pâtit.
En 2009, les éditions du Rocher sont revendues aux éditions Desclée de Brouwer. Placé en redressement judiciaire et lourdement endetté, le groupe ainsi formé est racheté en mars 2014 par le groupe Elidia, présidé par Bruno Nougayrède et Loïc Mérian.
Aujourd’hui
Le nombre de nouveautés par an est ramené à une soixantaine et, sous la houlette de Bruno Nougayrède, les éditions du Rocher retrouvent leur vocation de maison généraliste indépendante.
Un premier succès à l’automne 2014, avec une nouvelle édition de Changez d’alimentation du Pr Henri Joyeux vendue à plus de 150 000 exemplaires en quelques semaines, permet à la maison de repartir du bon pied.
Certaines des collections historiques sont poursuivies, et la production éditoriale est concentrée sur trois domaines : la littérature, l’actualité et les documents, le bien-être/pratique.
Une politique ambitieuse de développement des fonds numérique et papier est enclenchée.
Fidèle à ses origines et à son histoire, Le Rocher entre ainsi résolument dans le XXIe siècle et participe, à sa mesure, à la transmission du savoir et au plaisir de faire lire.